L’activité physique modérée est recommandée. L’objectif de la pratique régulière d’activités physiques prénatales est de maintenir une bonne condition physique tout au long de la grossesse et non d’accomplir une performance sportive. Les activités physiques d’intensité très élevée ne sont pas encouragées, même pour les femmes qui avaient cette pratique avant la grossesse. Les femmes qui prévoient s’entraîner au-delà des recommandations ou prendre part à des compétitions sportives, doivent en discuter avec le professionnel de la santé qui assure le suivi de grossesse. À l’heure actuelle, les données scientifiques ne permettent pas de savoir s’il est sécuritaire ou bénéfique d’accumuler un volume d’activité physique significativement plus élevé que celui recommandé. Les risques encourus doivent donc être discutés et les femmes doivent modifier, si nécessaire, leurs entraînements.
Ce qu’il faut savoir
Pour s’assurer de l’absence de contre-indication à l’activité physique, il est important que le professionnel qui suit la grossesse discute le plus tôt possible avec la femme enceinte de son désir de poursuivre ou d’entreprendre des activités physiques pendant sa grossesse. Ils devraient également remplir ensemble le document X-AAP pour les femmes enceintes22. Ce questionnaire est une liste de vérification et de prescription permettant d’évaluer l’aptitude des femmes enceintes désirant entreprendre un programme de conditionnement physique et d’assurer la supervision médicale continue des patientes enceintes qui font de l’activité physique.
Pratique adaptée aux trimestres de grossesse
Chaque trimestre est caractérisé par certains désagréments dont il faut tenir compte dans la pratique d’activités physiques :
1er trimestre
Le 1er trimestre est souvent associé aux nausées, aux vomissements et à une grande fatigue. Pour les femmes qui sont touchées par ces désagréments, la pratique d’activités d’intensité légère, comme la marche (idéalement à l’extérieur), permet de faire de l’activité physique sans se fatiguer davantage.
2e trimestre
Le 2e trimestre est le meilleur moment durant la grossesse pour pratiquer des activités physiques. Il est préférable de choisir des activités d’intensité modérée, qui sont plaisantes et pourront être pratiquées de manière fréquente (de trois à cinq fois par semaine), comme la marche rapide et l’aquaforme.
3e trimestre
Lors du 3e trimestre, les maux de dos, les inconforts et les pieds qui enflent sont souvent présents. De plus, avec l’avancement de la grossesse, les activités physiques vont paraître un peu plus ardues, notamment en raison des changements physiologiques et anatomiques liés à la grossesse. Les activités physiques qui paraissaient faciles avant la grossesse et lors des 1er et 2e trimestres demanderont un peu plus d’efforts en fin de grossesse. Il s’agira d’adapter les activités physiques (p. ex. : leurs positions et leur intensité), afin de limiter les inconforts et l’essoufflement. Les activités physiques pratiquées en piscine sont particulièrement intéressantes au 3e trimestre, car l’eau supporte le poids du corps et limite les œdèmes35.
Comment évaluer l’intensité de l’activité physique?
L’intensité des activités physiques cardiovasculaires peut être évaluée de différentes façons. En voici deux :
Le test de la parole
Une façon simple d’évaluer l’intensité d’une activité physique est d’utiliser le test de la parole. Par exemple, une activité physique d’intensité modérée est une activité pendant laquelle la femme enceinte est capable de parler, mais pas de chanter. Ainsi, la femme peut ajuster l’intensité si elle ne parvient pas à converser. Des exemples d’activités physiques d’intensité modérée incluent la marche rapide, l’aquaforme, le vélo stationnaire (effort modéré), les exercices de renforcement musculaire, transporter des charges de poids modéré et diverses tâches ménagères (p. ex. : jardiner, laver les vitres).
Zones cibles de la fréquence cardiaque
Une activité physique d’intensité modérée est suffisamment intense pour augmenter de manière perceptible le rythme cardiaque. Pour les femmes qui contrôlent leur fréquence cardiaque lors de leurs activités physiques en utilisant un cardiofréquencemètre, des plages de fréquences cardiaques sont proposées. (voir le tableau 2, ci-dessous).
Tableau 2
Plages de fréquences cardiaques cibles pour les femmes enceintes. Activité physique d’intensité modérée (40-59% fréquence cardiaque de réserve; FCR); activité physique d’intensité vigoureuse (60-80 % FCR).
Âge |
Intensité |
Fréquences cardiaques cibles
(battements/minute) |
---|
Moins de 30 ans |
Légère |
102 à 124 |
Modérée |
125 à 146 |
Vigoureuse |
147 à 169* |
30 ans et plus |
Légère |
101 à 129 |
Modérée |
121 à 141 |
Vigoureuse |
142 à 162* |
* Puisqu’il existe très peu d’information sur l’effet de l’activité physique pratiquée à une intensité se situant à la limite supérieure de la plage de fréquences cardiaques cibles pour l’intensité vigoureuse, les femmes qui souhaitent s’entraîner à cette intensité (ou au-delà), sont encouragées à consulter le professionnel de la santé qui assure leur suivi de grossesse.
Ces plages de fréquences cardiaques cibles ont été dérivées de tests d’effort maximal, administrés à des femmes enceintes à faible risque, qui avaient d’abord été soumises à un examen médical36,37.
Quels types d’activité physique choisir?
Les recommandations canadiennes préconisent la pratique d’activités physiques variées. Les activités physiques qui s’intègrent facilement dans la vie quotidienne et qui sont agréables à faire ont plus de chances d’être poursuivies tout au long de la grossesse, surtout quand leur pratique peut aisément être adaptée au stade de la grossesse (p. ex. : marcher moins vite ou moins longtemps en fin de grossesse).
Certaines mesures de sécurité doivent toutefois être prises pour s’assurer que la pratique de l’activité physique est sécuritaire pour la mère et le fœtus. Les activités physiques suivantes sont contre-indiquées :
Tableau 3
Exemples d’activités physiques et de mieux-être à conseiller et à proscrire
À conseillera |
À proscrire |
---|
- Marche rapide
- Course à piedb,c
- Vélo stationnaire
(incluant le spinning)
- Natation (longueurs)
- Aquaforme
- Danse aérobieb,c et ses variantes
(avec impacts aux sols réduits)
- Raquette, Ski de fond
- Exercices en salle d’entraînement
- Yoga
- Exercices du plancher pelvienc
- Exercices de renforcement de la gaine abdomino-lombaire
|
- Course à pied (si non pratiquée avant la grossesse)d
- Basketball, soccer, sports de raquette
- Sports de combat
- Équitation
- Cyclisme sur routee, vélo de montagne
- Gymnastique artistique
- Ski alpin
- Plongée sous-marine
- Activités physiques en altitude > 2500 mètres si le lieu de résidence est < 2500 mètresf
- Hot yoga
|
a. Choix des activités selon la condition physique de la femme. Les activités physiques devraient être effectuées à une intensité modérée.
b. La course à pied et la danse aérobie sont des activités physiques qui peuvent être pratiquées, mais qui demandent d’avoir des muscles du plancher pelvien forts afin d’éviter le risque de fuite urinaire à l’effort.
c. Voir la section « Plancher pelvien ».
d. Si la femme enceinte n’a jamais couru sur une base quotidienne avant sa grossesse, il n’est pas souhaitable qu’elle commence à le faire pendant la grossesse. Il vaut mieux qu’elle opte pour une des autres activités conseillées dans le tableau 3.
e. Le vélo de route comporte un risque élevé de chute en raison des modifications biomécaniques et de la capacité de réagir à l’environnement (p. ex : trafic, surfaces irrégulières) à mesure que la grossesse progresse;
f. Les femmes qui entrevoient faire de l’activité physique au-dessus de 2 500 mètres d’altitude devraient demander à être suivies par un professionnel de la santé qui assure le suivi de grossesse et qui possède des connaissances au sujet de l’impact de la haute altitude sur la santé maternelle et fœtale.
La musculature abdominale et lombaire joue un rôle essentiel dans le maintien de la posture, la stabilité et le mouvement du tronc, la stabilité pelvienne, la respiration, ainsi que dans le support des viscères abdominales et pelviennes. Le travail des abdominaux profonds (transverses) et superficiels (grands obliques, obliques externes et grands droits de l’abdomen) durant la grossesse, est donc important. Voici quelques exercices pour travailler les abdominaux : la planche abdominale (travail des grands droits de l’abdomen), qui peut être faite sur les orteils ou sur les genoux, selon le niveau de difficulté désiré, la planche abdominale en position latérale (travail des obliques et des transverses), et l’exercice du « chien de fusil ».
Les redressements assis ou « crunch » sont à proscrire pendant la grossesse. Ils ne sont pas non plus recommandés chez les adultes et les jeunes en général.
Pendant le 3e trimestre, la séparation des muscles abdominaux les plus superficiels, appelée la diastase des grands droits de l’abdomen, est assez fréquente (prévalence de 30 %)38. Il semblerait toutefois que le renforcement de la musculature abdominale pendant la période prénatale réduise le risque de développer une diastase des grands droits39.
Planche abdominale sur les orteils
Garder les pieds au sol, le corps droit et les abdominaux engagés. Se placer en appui sur les coudes, à la largeur des épaules.
Planche abdominale latérale
Contraction maximale à quatre pattes
Position de départ : à quatre pattes, le dos droit. Rentrer le nombril en engageant les abdominaux. Garder la position pendant 10 secondes. ATTENTION : ne pas arrondir le dos, ne pas bouger le bassin, ne pas serrer les fesses ni les jambes.
Chien de fusil
Pour une variante plus facile, lever seulement la jambe ou le bras.
Crédits photos : Pascale Turcotte.
Les précautions usuelles
Certains éléments liés à la pratique de l’activité physique lors de la grossesse demandent de la prudence.
Hydratation
La grossesse augmente la température du corps de 0,5 C à 1 C. L’activité physique contribue aussi à accroître la température corporelle40. Une augmentation de la température corporelle induit un phénomène de dissipation de la chaleur, qui sert à contrer cette augmentation de température. L’une des manifestations finales de la dissipation est la sudation. Si la perte d’eau associée à la sudation excède l’apport de fluides, un état de déshydratation s’ensuit41.
Il est donc important que la femme enceinte qui pratique une activité physique fasse preuve de vigilance afin de maintenir un bon état d’hydratation42. Voici les signes de déshydratation (de légère à modérée)43,44 :
- débit urinaire diminué;
- étourdissements liés à l’hypotension;
- état général d’affaiblissement;
- mal de tête;
- faible turgescence de la peau;
- sensation de soif;
- incapacité à cracher;
- muqueuses sèches.
Les besoins en eau chez la femme enceinte augmentent considérablement pour permettre l’accroissement de la masse hydrique du corps et répondre aux besoins métaboliques accrus du fœtus. En général, la femme enceinte a besoin de consommer environ 3 litres d’eau par jour, incluant l’eau bue et l’eau fournie par les autres boissons et les aliments45,46.
L’activité physique altère le mécanisme de la soif. Il ne faut donc pas attendre d’avoir soif pour boire. Afin de s’hydrater convenablement, il est proposé de boire de l’eau avant, durant et après l’activité physique. Il est suggéré de boire de petites quantités, pour un total de 150 à 350 ml par période de 15 à 20 minutes41. Pour les femmes qui pratiquent une activité physique soutenue durant plus d’une heure (p. ex. : randonnée), l’ajout de sucre et de sels minéraux dans l’eau, la consommation de jus de fruits ou de boissons sportives ou une collation est conseillé.
Attention! Les boissons énergisantes ne sont pas des boissons sportives! Les boissons sportives (ex. : Gatorade®) contiennent du sucre et des sels minéraux. Quant à elles, les boissons énergisantes (ex. : Red Bull®) contiennent de la caféine et d’autres produits, comme le ginseng, la taurine et l’inositol, dont les effets n’ont pas été évalués chez la femme enceinte47. Leur consommation n’est pas indiquée pendant la grossesse47.
Autres précautions
Il est recommandé que les femmes enceintes se protègent adéquatement contre les coups de chaleur ou l’hyperthermie.
Pendant les exercices de renforcement musculaire, il est déconseillé de bloquer la respiration à la fois par la bouche et par le nez. Cette façon de faire peut causer une augmentation non souhaitable de la pression artérielle et doit être évitée en tout temps, et à plus forte raison pendant la grossesse. Il faut respirer normalement pendant les exercices.
Lors de la grossesse, plusieurs changements hormonaux surviennent, notamment une augmentation des niveaux de relaxine. Cette hormone provoque l’assouplissement et la relaxation de l’utérus, des ligaments pelviens et de la symphyse pubienne, ce qui facilitera l’expulsion du bébé. Mais elle rend aussi les autres articulations du corps plus souples. De ce fait, les exercices qui demandent une grande amplitude de mouvement, des changements de direction brusques ou des sauts sont à éviter (voir tableau 3). Les étirements doivent être bien contrôlés22.
Finalement, il est déconseillé de faire des exercices en position couchée sur le dos après quatre mois de grossesse, afin d’éviter une diminution de l’apport sanguin vers la partie supérieure du corps (risque d’étourdissements) ou une artère majeure irriguant le placenta. Les exercices effectués en position couchée sur le dos doivent par conséquent être modifiés et effectués en position semi-assise. Il est suggéré de placer des oreillers ou un matelas incliné derrière le dos afin de favoriser la réalisation des exercices dans cette position.
Savoir quand s’arrêter
Il est recommandé à la femme de mettre fin à l’activité physique et de consulter le professionnel de la santé assurant le suivi de grossesse, si elle présente l’un ou plusieurs des symptômes suivants mentionnés dans le guide X-AAPa :
- essoufflement marqué et persistant qui ne disparaît pas avec le repos;
- douleur sévère à la poitrine;
- contractions douloureuses et régulières de l’utérus;
- saignement vaginal;
- perte persistante de fluide vaginal indiquant la rupture des membranes;
- étourdissement persistant qui ne disparaît pas avec le repos ou évanouissement.
Au-delà de l’intensité, de la fréquence ou de la durée de ses activités physiques, le principe que la femme enceinte devrait suivre tout au long de sa grossesse est d’adapter ses activités. Il est important qu’elle choisisse des activités diversifiées qui n’amplifieront pas les maux reliés à la grossesse et qui ne comporteront pas de risque pour la santé de la mère et celle de son futur enfant. L’idéal est de multiplier les moments pour être active tout au long de la journée, tout en y associant du plaisir et de la satisfaction.
a. Disponible au www.csep.ca/CMFiles/publications/parq/x-aapenceintes.pdf